Circé : la sorcière parfaite pour Halloween (pour tous les jours, en fait).

Halloween, c’était la semaine passée. Halloween, ou plutôt, Samhain devrais-je dire en tant que bonne sorcière. Mais, c’est quoi être une bonne sorcière ? Est-ce qu’il y a réellement un mode d’emploi ? Pour révéler les dessous de cette figure fréquemment choisie en costume halloweenesque et décriée au fil des siècles, j’ai choisi de prendre Circé, déesse sorcière issue de la mythologie grecque, comme exemple. De quoi witchiser tout le monde, même les plus réticent.e.s !

Pourquoi Circé ? Eh bien, tout simplement parce qu’elle est la première sorcière. Rendons à Cé… Circé ce qui est à Circé, voyons !

Cependant, à son époque, le mot « sorcière » ne figurait nulle part. « Quand je suis née, le mot désignant ce que j’étais n’existait pas », raconte Circé dans les premières lignes du roman au regard féminin de Madeline Miller. À la place, on utilisait le terme « πολυφάρμακος / polyphármakos », qui signifie « particulièrement expert·e en de multiples drogues ou poisons, capable d’opérer des métamorphoses ». 

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(Re)prendre son pouvoir

Circé vit dans le palais de son père, Hélios, qui, de sa lumière, ne fait que l’éteindre. Au sein de cette demeure familiale, son potentiel est brimé. Elle est considérée comme “hors-norme”, “dramatique”… Coincée dans le rôle d’enfant au physique jugé “ingrat” par ses pairs et considérée comme inutile et inexistante, elle fait le choix de se réfugier dans sa solitude. Ceux qui l’approchent ne feront que se jouer d’elle et abuseront de son besoin d’amour et de reconnaissance. Ambiance


Jusqu’à ce qu’elle décide de reprendre pleinement possession de son existence en choisissant la rébellion et l’insoumission. Deux armes qui provoquent son exil sur l’île d’Eéa. Île où elle fera la rencontre de multiples personnages, dont Ulysse et son équipage, qu’elle transformera au gré de ses envies en cochons. Non pas parce qu’elle est une enfant indisciplinée et odieuse, comme voudrait nous le faire croire les anciens mythes écrits par des hommes (tiens, tiens) mais bien parce que ceux-ci tentent de la violenter. J’entends déjà au loin les adeptes du mot “misandre” s’insurger… Avez-vous lu mon précédent article sur le sujet ? 🙄

Une nouvelle représentation du mythe grec

Madeline Miller, grâce au female-gaze, redonne à Circé, la gloire qu’elle mérite. Au revoir la version infantilisée ! Bonjour à la sorcière, à la fois déterminée, féroce, douce et aimante. Sur cette île, on y découvre un femme en quête de sérénité, d’apprentissage, de liens authentiques. Elle cherche à se réapproprier qui elle est vraiment.Et qui est-elle ? Ni plus ni moins qu’une meuf badass féministe et sorcière. Elle est libre, forte, indépendante. Exilée, loin des normes sociétales et familiales, elle brise les codes et n’entre dans aucune case. Son rôle de mère ne lui plaît guère, elle accumule les histoires d’amour et chérit ses moments solo accompagnée de sa fidèle lionne. Une presque Childless Cat Lady qui aurait fait flipper le politicien américain J.D Vance, comme Taylor Swift  ! 

Circé, l’inspiration dont on a besoin

Durant des siècles, une femme était cataloguée sorcière si elle contrait un tant soit peu l’autorité, si elle était libre et sortait des sentiers battus (et surtout si elle était “laide” et accompagnée d’un chat noir).
Il suffisait de faire preuve d’intelligence, d’ouverture d’esprit et de défiance pour se retrouver illico presto sur le bûcher.

Depuis les années 70, nombreuses féministes ont mené le combat pour réhabiliter la figure tant décriée et stéréotypée de la sorcière. Et Circé en fait partie, bien que ce terme n’existait pas en ses temps et qu’elle ne savait absolument pas comment définir sa “bizarrerie”. Elle possède certaines (voire toutes) les caractéristiques qui se retrouvent dans la vision féministe de la sorcière :

  • elle est autonome, se découvre par elle-même et crée ses propres “potions”
  • elle ne se soumet pas au pouvoir masculin et n’est pas réduite à son partenaire (ou sa, ou ses)
  • elle remet en cause l’ordre établi et développe sa propre façon de vivre
  • elle refuse le moule de la famille patriarcale
  • elle s’émancipe du male gaze
  • elle assume sa vieillesse
  • elle peut choisir de refuser la maternité
  • elle se réapproprie son corps

De nos jours, une sorcière est finalement une femme qui existe pour elle-même et ne se conforme pas à un rôle social. Elle s’oppose aux idéaux et n’est ni docile, ni soumise. Dans le langage commun, c’est une figure devenue incontournable de l’empowerment féminin. Et cela dérange. Qui ? On se le demande (ou pas).

Ô mon beau grimoire, dis-moi comment être une sorcière ?

Personnellement, tout comme Sarah, l’autrice de l’article sur Tapage “Pourquoi (et comment) je suis devenue une sorcière”, cela a mis du temps pour que je m’autoproclame comme telle. Je craignais que l’Instance des Sorcières Professionnelles (je viens de l’inventer) vienne me taper sur les doigts car je n’étais pas “assez witchy”.

Et pourtant, à l’instar de Sarah, j’ai été baignée dans une famille où l’on a toujours cru aux énergies, aux cartes, aux remèdes. Et plus encore, j’ai toujours été entourée de femmes atypiques aux choix de vie qui contrarient. Moi-même, j’en fais partie. 

Dans mon imaginaire, être une sorcière, c’était d’office être une adepte régulière de remèdes naturels, de lithothérapie, de tarots et de trucs et astuces pour manifester. Dans la réalité, il n’est pas obligatoire d’être pratiquante de tous ces préceptes. Tant mieux, car je n’ai pas forcément le CV idéal. Je ne suis pas régulière dans mes guidances, je ne brûle pas toujours de l’encens, j’oublie le calendrier lunaire… Bref, être une sorcière relève plutôt d’un mindset, pour moi, que d’une pratique à temps plein. 

Prendre soin de soi, créer de nouveaux outils et remèdes, penser un nouveau monde et des rapports plus justes, être proche de ses  émotions et de la nature, se rebeller contre le mal(e) dominant, être engagée, (re)prendre le contrôle sur son corps et ses envies, s’écouter, être libre de ses choix… C’est ça, la vraie magie !

Que tu sois cartésienne, militante, astrologue bancale, hypersensible, illuminée, affirmée, timide, douce, sauvage… Si tu fais le pas de  “penser en-dehors des perceptions conventionnelles” (cfr. Starhawk) pour te réapproprier ton quotidien, alors tu es indéniablement une sorcière. Bienvenue au club !

La sorcellerie ne s’apprend pas. On la trouve soi-même, ou pas.

Circé, Madeline Miller.

J’ai l’intuition (truc de sorcière) que c’est un héritage que l’on porte toustes en soi. Il ne demande qu’à jaillir, qu’à prendre sa place, qu’à s’étendre. Être sorcière, c’est plus qu’un déguisement ou une cérémonie dédiée à Samhain. Il s’agit de reprendre ses droits, son présent et son avenir. C’est continuer à se battre en tous temps car : 

« Nous sommes les petites filles des sorcières que vous n’avez pas pu brûler. »

Et ça, ça fait bien plus peur qu’un costume de zombie. 

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