Souffrir pendant ses règles, c’est normal docteur?

En ce mois de l’endométriose, chez Nicole, on a voulu se pencher sur ce que ça voulait dire de souffrir pendant ses règles. Force est de constater qu’on est beaucoup dans ce cas. Mais est-ce que ça veut toujours dire qu’on souffre d’endométriose ou de SOPK? On a voulu vous laisser la parole pour en parler et vous aviez des choses à dire ! 

Endométriose : enchantée

Déjà, commençons par les bases. L’endométriose, c’est quoi ? On s’est pas foulées, l’asbl Toi Mon Endo nous a mâché le travail pour la description : “Tout au long du cycle menstruel, l’endomètre (tissu qui tapisse la paroi interne de l’utérus) s’épaissit afin d’accueillir un éventuel embryon. Si en fin de cycle, il n’y a pas eu de fécondation, alors, l’endomètre se désagrège naturellement par le biais de saignements et c’est ce qu’on appelle plus communément les règles. Chez les femmes atteintes d’endométriose, des cellules semblables à l’endomètre migrent et s’implantent soit en dehors de leur place habituelle qu’est l’utérus (le système reproducteur, l’appareil urinaire/digestif/pulmonaire,…) et on parle alors d’endométriose, soit s’infiltrent dans le myomètre (qui est le muscle utérin) et on parle alors d’adénomyose, autrement dit, la cousine de l’endométriose.” 

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En somme, l’endométriose c’est une maladie pas très fun qui fait que ton endomètre se balade un peu partout et te fait souffrir. Les symptômes sont multiples : mal dans le bas du dos, douleurs dans le bas du ventre et dans le haut des cuisses, maux de têtes, diarrhées ou constipation, ballonnements, fatigue intense, chutes de tension et vertiges, vomissements, nausées, douleurs pendant les rapports sexuels, saignements parfois très abondants, douleurs neuropathiques, crampes vaginales (et parce qu’on est là pour dire les choses : crampes anales aussi), etc. Note toutefois que toutes les personnes menstruées souffrant d’endométriose n’ont pas forcément TOUS les symptômes. Ça signifie que tu peux souffrir d’endométriose même si tu n’en as aucun ou tu peux avoir certains de ces symptômes sans avoir d’endométriose.

S’ajoute normalement à ça aussi une difficulté à procréer. Mais comme le dit Laura, la créatrice et ambassadrice de l’asbl Toi Mon Endo, quand on souffre tous les mois, on s’en fiche un peu de cet effet secondaire. D’autant plus que l’endométriose, ça n’est pas juste lié aux règles, on peut avoir des crises un peu n’importe quand. Et c’est d’ailleurs très ironique de souffrir autant à cause d’un organe reproducteur qui ne servira peut-être jamais (parce qu’on n’est même pas sûres de vouloir un enfant ou qu’on n’arrive pas à en avoir).  

Il existe plusieurs types d’endométriose (profonde, superficielle, ovarienne) et il existe plusieurs manières de dépister la maladie (examen gynécologique par échographie ou toucher vaginal, IRM ou, en dernier recours, intervention chirurgicale). Ce qu’il faut savoir aussi, c’est que c’est une maladie dont on ne guérit pas. On réduit l’ampleur des symptômes (on y reviendra plus tard) ou on la soigne (via une endoscopie) mais on n’en guérit jamais. Parce que, par principe, c’est une maladie qui suit le cycle menstruel et comme tout cycle qui se respecte, bah … ça revient. Sinon, ça serait moins drôle ! 

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Et le SOPK?

L’endométriose, ça n’est pas la seule maladie liée aux règles qui fait souffrir. Il existe également le syndrôme des ovaires polykystiques, communément appelé le SOPK. C’est un dérèglement hormonal, de même que l’endométriose, qui entraîne une production excessive d’androgènes (en particulier de testostérone). Il peut entraîner des troubles de la fertilité et de la pilosité (hirsutisme), ainsi que des complications métaboliques (diabète) et des règles très abondantes (tu sais, celles pour lesquelles tu dois changer de protection toutes les heures).

Comme l’endométriose, pour découvrir si tu souffres de SOPK, c’est souvent le parcours du combattant. Quand j’ai demandé à une quinzaine de personnes menstruées si elles avaient reçu un diagnostic lié à leurs douleurs de règles, la plupart m’ont répondu oui. Les autres m’ont répondu qu’elles avaient vu plusieurs médecins mais que les réponses sur le sujet étaient assez évasives. Beaucoup ont dû faire les démarches toutes seules pour découvrir ce dont elles souffraient. 

Il y a un an et demi, j’ai appris que je souffrais d’endométriose et d’adénomyose : ce que certain·es gynécologues appellent la “maladie du moment”. Et comme beaucoup, j’ai dû faire mes petites recherches personnelles – sur Wikipédia, sur Internet, sur Instagram – pour découvrir ce dont je souffrais depuis que j’avais treize ans. J’ai vu environ sept médecins pendant dix ans avant qu’on me prenne au sérieux et qu’on m’écoute. Sans aborder le sujet des violences gynécologiques (c’est un tout autre sujet dont on a déjà parlé chez Nicole dans cet article), la plupart des personnes que j’ai interviewé m’ont parlé de cette façon dont les médecins, hommes comme femmes, rechignent à prendre en compte le ressenti des patient·es. C’est pour ça que le SOPK et l’endométriose prennent souvent jusqu’à douze ans avant d’être découverts par les médecins. 

On te cache pas que peu de gens semblent connaître l’existence de ces maladies avant de recevoir un diagnostic. Quand j’ai demandé aux personnes interviewées si elles connaissaient le SOPK ou l’endométriose avant de consulter un médecin, certain·es m’ont parlé des campagnes de sensibilisation de la chanteuse Lorie ou de Laetitia Milot. L’une d’entre elle m’a dit qu’elle en avait entendu parlé à l’école et j’étais super fière ! Pour le reste, la plupart n’en avait jamais entendu parler et ça, c’est assez grave. Il faudrait informer un maximum sur le sujet ; dans les hôpitaux, dans les cabinets médicaux, dans les écoles, dans les entreprises. C’est ce qu’essaye de faire l’asbl Toi Mon Endo : parce qu’on ne peut pas soigner, mais au moins on peut informer. L’important, c’est que le sujet des règles – et encore davantage des règles douloureuses – soit moins tabou qu’il ne l’est pour le moment. On souffre et on a le droit de le dire ! 

L’angoisse de la tache

D’autant plus que les règles, ça crée une source de stress supplémentaire aux personnes menstruées (dont on pourrait clairement se passer, si tu veux mon avis). Que ça soit l’angoisse liée aux douleurs, à la tache de sang sur le pantalon blanc ou au fait de louper un jour de cours/de travail parce qu’on a envie de rester couché en boule dans son lit, les raisons sont diverses. Quoi qu’il arrive, on se stresse à cause de ce sang qui coule entre nos cuisses. Parce que les règles, en soit, c’est déjà un tabou alors imagine si ça se voit que tu les as ! 

De toutes les personnes que j’ai interviewé pour cet article, toutes m’ont dit être angoissées avant la période fatidique du mois. Plusieurs refusent même certains types de job de peur d’avoir des difficultés : ne pas pouvoir changer sa serviette quand on en a besoin, ne pas pouvoir prendre des pauses quand c’est nécessaire, ne pas pouvoir faire du télétravail alors qu’encore une fois, on aimerait faire le burrito sous la couette. D’autres ont peur de s’évanouir à cause de la douleur, de ne pas être à 100% lors d’activités (perso ou pro d’ailleurs). Et pour celles qui prennent la pilule continue, c’est l’angoisse de l’oublier et des douleurs qui vont suivre. 

En somme, c’est déjà pas simple de gérer le sang qui te coule entre les cuisses mais en plus de ça, tu dois gérer tes douleurs et le regard des autres sur toi. 

Comment ça se soigne?

Comme je l’ai dit plus haut, l’endométriose ou le SOPK, ça ne se guérit pas mais ça se soigne (tout du moins, on peut soulager la douleur). 

Pour arrêter de souffrir le martyr, on a trouvé quelques tips pour toi : 

  • Les tisanes (camomille, menthe poivrée ou framboisier par exemple)
  • Une bouillotte ou une couverture chauffante (à l’inverse, certain·es préfèrent le froid)
  • Les huiles essentielles sur le bas du ventre ou le bas du dos (on m’a conseillé un mélange d’huiles essentielles à base de lemongrass, romarin, menthe poivrée, basilic, hélichryse et de cyprès) 
  • Une alimentation pauvre en aliments inflammatoires (tout ce qui est gluten, lactose et sucre) 

Ça ne veut pas dire que tu dois bannir définitivement ces aliments de ton alimentation, juste que tu peux peut-être faire plus attention à certains moments du mois. On n’est pas là pour te créer des TCA !

  • Le repos, beaucoup de repos (surtout si tu peux te le permettre) 
  • Les douches chaudes 
  • Les massages 
  • Manger des trucs qui te font du bien et qui sont réconfortants 
  • Les médicaments anti inflammatoires (je ne suis pas médecin du coup je ne vais pas te fournir une liste mais renseigne toi en pharmacie)

J’ajoute également, pour les obstinées comme moi, ça n’est pas normal de souffrir et ça n’est pas un aveu de faiblesse que de prendre un Dafalgan. Ta valeur ne dépend pas de combien de médicaments tu prends par jour/mois pour résister à la douleur. Tu es un·e warrior quoi qu’il arrive ! 

  • Les médecines alternatives (acupuncture par exemple)
  • Si ton corps te le permet, fais du sport qui te détend (type yoga ou marche) 
  • Écoute ton corps : s’il te dit qu’il a besoin de repos, c’est qu’il en a besoin ! 
  • Occupe-toi l’esprit avec des choses qui te font du bien 
  • La pilule contraceptive, continue ou non, en fonction de ce que te conseillent les médecins

Note que, la pilule, beaucoup de femmes l’arrêtent pour des raisons diverses. Pourtant, avec l’endométriose ou le SOPK, les médecins se ruent sur cette option pour calmer les douleurs. Raison pour laquelle beaucoup de personnes menstruées qui souffrent pendant leurs règles se retrouvent sous médicament contraceptif dès 12 ou 13 ans. Toutefois, nombreuses sont les patientes qui changent 3 à 4 fois de pilule avant d’en trouver une qui convient : continuité des douleurs, perte de cheveux, perte de libido, dépression. De plus, il faut savoir que la pilule contraceptive, qu’elle soit prise en continue ou non, ne fait que masquer les dégâts en attendant. Il y a des handicaps de l’endométriose ou du SOPK qui restent, dans tous les cas. La pilule, ça reste une solution, mais à court terme. 

The best tip of all : si tu souffres trop, fais toi tester pour l’endométriose ou le SOPK ou consulte un médecin ! Ne perds pas espoir parce que quelqu’un te dit que tu n’as rien. Persévère, même si c’est dûr. Si tu es convaincu·e en tout fort intérieur que tu as quelque chose, va voir un·e autre médecin. Il y aura toujours bien quelqu’un pour t’écouter. 

On vous a demandé…

Qu’est-ce que tu as comme symptômes? Depuis quand ?

Mahaut : « j’ai des fortes douleurs dans le bas du dos et dans le bas du ventre et je suis très fatiguée, et j’ai aussi des fort saignement, un tampon me fait que 1 ou 2h les premiers jours. Parfois elles durent très longtemps et j’ai des spottings »

Justine : « mes premiers symptômes ont commencé dès les débuts de mes règles à 11 ans (mal au ventre) et ils se sont vraiment intensifiés vers 16 ans. Niveau symptômes c’est : douleurs ventre et bas du dos irradiant dans les jambes, chute de tension, nausées. Mes douleurs peuvent aussi venir hors règles lors des crises d’endométrioses. Alors pour les crises en dehors des règles, c’est des douleurs au ventre et dans les reins, parfois ça fait même comme une sciatique, cela peut durer quelques heures comme 24h. »

Est-ce qu’ils se sont atténués ou empirés?

Mahaut : « depuis que j’ai mon stérilet en cuivre surtout donc depuis environ un an. Du coup non franchement j’ai pas trop envie de prendre un autre moyen de contraception pour l’instant. Oui avant ça j’avais déjà des règles douloureuse mais seulement le premier jour maintenant ça peut commencer quelques jours avant. Oui pour les hormones et puis c’est quand même tranquille pour 5 ans donc c’est pratique. » 

Est-ce que tu as consulté des médecins? Si oui, qu’est-ce qu’ils ont dit ?

Mahaut: « j’ai vu des médecins, j’ai passé des dépistages et une échographie mais rien de concluant, le stérilet était en place et pas de signe de maladies, je dois encore passer un bilan hormonal pour être sûre, ma mère et ma grand mère ont des ovaires polykystiques. Oui toutes les deux, ma mère le savaitquand elle voulait des enfants parce que ça a pas été facile. »

Justine: « j’ai vu des médecins traitant toute mon adolescence car je loupais souvent les cours à cause des douleurs. Il n’a jamais rien dit hormis une prescription d’anti-douleurs. Pour le gynécologue j’y allais une fois par an à partir de mes 16 ans, pareil il n’a jamais rien dit par rapport à mes douleurs. Je me suis posé tellement de questions et en même temps je ne savais pas quoi poser, cette maladie on en parlait pas encore beaucoup quand je l’ai appris et les médecins ne disaient pas grand choses. Alors les médecins ne me conseillent que la pilule et les anti douleurs, anti inflammatoire, c’est donc pour ça que j’ai fait beaucoup de recherches par moi même. »

Est-ce que tu prends des médicaments (pilules ou anti douleurs)?

Justine: « j’ai eu un diagnostic en 2019 et je souffrais vraiment fort tous les mois depuis 2012, j’ai donc eu 7 ans d’errance à ne pas comprendre pourquoi j’ai si mal, pourquoi aucun médecin ne s’y intéressait vraiment, je pense que malheureusement les médecins (surtout les anciens) pensaient que c’était normal pour une femme d’avoir mal durant les règles et aussi se disaient que j’étais une jeune « chochotte » ou bien que je ne voulais pas aller en cours. Voilà comment je l’ai ressenti. »

Est-ce que tu as des tips pour te sentir mieux? 

Léa : « écouter son corps, se reposer et prendre son temps pour que le corps se remette de son cycle hormonal. » 

Mahaut : « me reposer, prendre mon temps et attendre que ça passe »

Justine: « ce que je fais qui m’aide c’est d’éviter les aliments pro inflammatoires, avoir une bonne hygiène de vie pour éviter les crises et les douleurs, mais c’est clairement pas magique… ça m’aide à éviter d’avoir des crises en dehors des règles, mais les douleurs lors menstruations sont toujours présentes quoi qu’il arrive.. je me renseigne sur tout ce qui est médecines alternatives, comme l’acupuncture, j’aimerai essayer de faire du yoga aussi. »

Maëlanne: « prendre des douches chaudes et manger des choses qui font du bien. » 

Laura : « la bouillotte chaude sur le bas du ventre et prise d’anti inflammatoire. »

Ermela: « boire beaucoup d’eau, accepter le moment. Demander plus d’empathie aux gens parce que les règles ça ne doit pas être douloureux. »