Violences gynécologiques et obstétricales: lever le tabou

La parole se libère, les victimes de violences gynécologiques et obstétricales se font de plus en plus entendre. Sur les réseaux sociaux se joue un véritable game changer: les témoignages sont mis en lumière et les coupables sont accusés. À tout âge, les femmes peuvent subir ces violences: visites gynéco, accouchement, examens, quand la communication entre le.la médecin et la patiente ne se fait pas, n’ose pas se faire, où n’est pas encouragée à être faite, les conséquences peuvent être graves. Comment et pourquoi ces violences se produisent? Comment les combattre? 

« Soudainement, sans me prévenir, il enfonce ses doigts dans mon vagin », « Avortes, tu es trop jeune, prends les comprimés, je te dis, tu en parleras à ton copain plus tard », « Comment voulez-vous que j’y arrive, vous êtes costaude et votre sexe est beaucoup trop gros ». Marine Gabriel fait part de ces témoignages dans son ouvrage La vérité au bout des lèvres. Des témoignages glaçants, frappants, et par-dessus tout, révoltants. Cependant, ceux-ci permettent de lever le tabou autour des violences obstétricales et gynécologiques encore bien présentes aujourd’hui.

Violences gynécologiques ou obstétricales ?

Différencions d’abord les violences  gynécologiques des violences obstétricales. Les premières concernent celles pouvant se produire tout au long de la vie des femmes c’est-à-dire lors des consultations de routine. La deuxième concerne les violences que les femmes peuvent subir lors de leur accouchement. 

De manière plus générale, ces violences gynécologiques et obstétricales (VOG) se définissent par : « (…) un ensemble de gestes, de paroles et d’actes médicaux qui viennent porter atteinte à l’intégrité physique et mentale des patientes de façon plus ou moins sévère » (Marine Gabriel).
Point important: violences physiques, mais aussi gestuelles ET verbales! Trop souvent négligées, les violences psychologiques sont également récurrentes et passées sous silence. Un exemple: la culpabilité infligée à certaines femmes. « Si vous ne poussez pas correctement, votre bébé ne sortira pas en bonne santé », « Vous criez vraiment pour rien », « Poussez! C’est quand même pas compliqué »… Des paroles dures pouvant avoir un impact à long terme sur l’estime de soi et l’image en tant que future maman.

D’autres VOG peuvent porter sur des jugements face au choix d’avorter qu’il soit volontaire ou médicalisé, des réflexions sur l’apparence physique de la personne, des actes réalisés sans demande de consentement préalable, comme le fameux point du mari qui consiste à suturer le périnée d’un point supplémentaire, sans aucun consentement de la patiente. Dans quel but? Accentuer le plaisir de Monsieur lors du premier rapport sexuel après l’accouchement. Quels mots peuvent définir un tel acte? Sexisme? Barbarie? 

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D’autres VOG peuvent porter sur (…) des actes réalisés sans demande de consentement préalable, comme le fameux point du mari qui consiste à suturer le périnée d’un point supplémentaire. Dans quel but? Accentuer le plaisir de Monsieur.

Violences et patriarcat

De telles violences encore aujourd’hui? Bien sûr. Les VOG sont des violences systémiques. La raison? L’influence de notre société patriarcale. Comme évoqué dans le livre, La vérité au bout des lèvres : « Beaucoup de patricien.nes ont encore une vision très patriarcale de leur métier fondé sur un fait: ils/elles détiennent un savoir que nous patient.es nous n’avons pas » (Marine Gabriel). Nous parlons, une nouvelle fois, de soumission à une autorité (ici le corps médical) entraînant un réflexe d’acceptation, de normalité chez le/la patient.e. « J’étais contraint de vous faire une épisiotomie, c’était la vie de votre bébé en jeu ». Qui oserait contredire « ce médecin » qui détient un pseudo savoir absolu? Sûrement pas le/la patient.e.

L’objet de cet article n’est en aucun cas d’incriminer une profession et encore moins l’idée d’en faire une généralité. Certaines situations impliquent forcément des décisions professionnelles. Je me questionne sur la façon d’informer la patiente, de l’inclure dans le processus de soin et de pratique d’interventions. C’est elle qui reste la maîtresse de son corps. Le.la médecin détient le savoir, mais n’est-ce pas une décision qu’il faut prendre en concertation?

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Médecins et patientes: alliés?

Marine Gabriel amène le regard très intéressant d’une gynécologue: « Il faut également en finir avec la vision paternaliste de la médecine qui sous-entend une relation verticale où le/la professionnel.le de la santé détiendrait le savoir et donc déciderait pour la patiente et pour passer à une relation plus horizontale de collaboration entre médecin et patitent.es » (Marine Gabriel). Pour ce faire, il faut arriver à instaurer la bienveillance dans la relation et des avis objectifs de la part du médecin, le subjectif n’a aucune place dans une relation de soin. 

Le problème majeur est que la plupart des femmes victimes n’ont pas conscience de la gravité de ce qu’elles subissent, que ces VOG ne sont pas normales et acceptables. Il est difficile d’en parler et surtout décourageant pour les femmes victimes car la justice face au corps médical prend souvent parti. En effet, « l’impunité et la toute-puissance du corps médical sont systémiques ». (Marine Gabriel) Personne n’a envie de rentrer dans un combat où dès le début il ne se sentira pas légitime.

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Le combat contre ces violences est encore long, mais pas sans espoir. Nous voyons de plus en plus de conscientisation de la part du corps médical et de plus en plus de femmes osent en parler. De plus, la justice bouge, dans le documentaire « Accoucher, le mal des mères », une bonne nouvelle est annoncée « depuis peu, les partis politiques s’intéressent à la question. Les violences obstétricales font actuellement l’objet d’auditions au Sénat. Elles aboutiront prochainement sur des recommandations à destination des hôpitaux et du personnel soignant ». La reconnaissance d’une non-normalité est la plus belle victoire, celle de déconstruire une société patriarcale semblant être normale.

Rendez-vous mardi prochain, 8h ❤️

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